© Musée Curie (coll. ACJC)

Biographie d’Eve Curie Labouisse, deuxième fille de Pierre et Marie Curie, sœur d’Irène Joliot-Curie

Eve Curie (1904-2007), femme de lettres, pianiste, héroïne de la France Libre, journaliste et diplomate française, est surtout connue pour être l'auteur de la première biographie de sa mère « Madame Curie ». Découvrez l’itinéraire singulier de cette femme engagée, discrète, qui a traversé le XXe siècle avec la volonté de faire valoir les idéaux de liberté et de justice chers à sa famille.

eve Curie (1904-2007)

La seule de la famille à avoir choisi une carrière artistique

Eve Curie est née à Paris le 6 décembre 1904. Soeur cadette d’Irène Joliot-Curie, deuxième fille de Pierre et Marie Curie, elle est la seule de la famille, comme elle aimait le rappeler, à ne pas avoir choisi une carrière scientifique. Elle n’a qu’un an lorsque, Pierre Curie, son père meurt. Encouragée par sa mère, elle préfère les études littéraires et artistiques. Elle commence une brève carrière de pianiste, formée à la fin de la Première guerre mondiale par le virtuose du piano et compositeur polonais, Ignacy Jan Paderewski. Elle se produit pour la première fois à Paris en 1925. D'une beauté éblouissante au port de tête altier, elle embrasse une courte carrière de mannequin et est modèle photo pour Lanvin et Schiaparelli entre autre.

Eve Curie et sa mère

Avec sa mère, Marie Curie, elle partage tendresse et joie de vivre avec humour, compensant ainsi la complicité scientifique qu’elle n’aura jamais avec celle qu’elle admirait tant. Après le décès de celle-ci en 1934, elle classe les lettres et documents qu’elle a laissés. Puis, elle écrit trois ans plus tard une biographie de sa mère intitulée “Madame Curie”. Traduit en 35 langues, cet ouvrage devient rapidement un best-seller mondial. L’édition de poche est toujours prisée des admirateurs de Marie Curie et des visiteurs du Musée Curie.

Extrait d'une lettre de Marie Curie à sa fille Eve du 12 septembre 1921 : « Je comprends parfaitement bien que tes progrès en musique te semblent maintenant moins rapides, car tu avais beaucoup à rattraper en régularité, et après un travail plus sommaire succède nécessairement un travail de perfectionnement plus délicat. Mais comme l’exigence qu’on se pose à soi-même va en augmentant, je suppose que les petites différences obtenues plus tard doivent donner à peu près autant de satisfaction, sinon davantage que les avantages assez rapidement acquis tout d’abord. Du moins, il me semble que cela se passerait ainsi pour ce qui me concerne. »

Au cours de sa vie, en plus de ce travail de mémoire, elle fait de nombreuses donations à la Bibliothèque nationale de France et au Musée Curie, contribuant à la conservation des archives de ses parents et à la diffusion de leur oeuvre.

L'engagement d'Eve Curie pour la France Libre

En 1940, après la défaite française, elle s'installe au Royaume-Uni et travaille pour les Alliés jusqu'à la fin de la guerre. Dès l’appel du 18 juin 1940 elle s’engage auprès du Général de Gaulle pour la France Libre et le rejoint à Londres le 23 juin. Elle est officier de liaison, et en 1943 est envoyée à Alger auprès du général Jean de Lattre de Tassigny. Elle devient correspondante de guerre pour deux agences de presse, l'une américaine et l'autre anglaise pour lesquelles elle publie des chroniques. Elle voyage en Afrique, au Moyen-Orient et dans l'Asie en guerre avec des chefs d'Etat et des personnalités telles que Tchang-Kaï-Chek, Gandhi, Nehru. Elle publie en 1944 "Journey among warriors" ("Voyage parmi les guerriers") une chronique de ses voyages sur les fronts de la Seconde guerre mondiale.

Eve Curie, l'une des premières femmes diplomates

En 1952, elle devient une des premières femmes diplomates de son époque en étant conseillère spéciale du Secrétaire général de l'OTAN. Deux ans plus tard, en 1954, elle épouse l’américain Henry Labouisse, qui fut pendant 15 ans président exécutif de l'Unicef. Elle s’engage auprès de lui pour la défense des enfants. Henry Labouisse reçoit le Prix Nobel de la paix au nom de l’organisation humanitaire en 1965. Dans le cadre de leurs fonctions, Ève et son époux voyagent dans plus de 100 pays.

Eve Curie, premier mécène du Musée Curie

Eve Curie est administrateur de la Fondation Curie de 1957 à 1967.

Devenue citoyenne américaine en 1958, elle est promue par la France, en 2005 au rang d'officier de la Légion d'honneur pour sa contribution à la cause humanitaire, au cours d'une cérémonie dans les locaux de l'Unicef.

Eve Curie Labouisse décède le 22 octobre 2007 à New-York à l’âge de 103 ans.

« Il y a eu 6 Prix Nobel dans ma famille : deux pour ma mère, un pour mon père, un pour ma sœur , un pour mon beau-frère et un pour mon mari. Il n’y a que moi qui n’ai pas réussi ... » aimait-elle raconter.

Sensible à la diffusion de l’œuvre de ses parents, elle fait un legs au Musée Curie permettant sa rénovation en 2012. Les archives privées d'Eve Curie sont mises en dépôt par la famille au Centre de Ressources Historiques du musée en 2009.

© Source : Musée Curie (coll. ACJC)

Marie Curie et ses deux filles, Irène (à droite) et Eve (à gauche), en 1908

© Source : Photo  Abey Musée Curie (coll. ACJC)

Eve Curie vers 1920

© Source : Musée Curie (coll. ACJC)

Eve Curie en 1921

© Source : Photo  Philippe Pottier Musée Curie (coll. ACJC)

Eve Curie vers 1937

pour aller plus loin

A LIRE :

> « Eve Curie, l'autre fille de Pierre et Marie Curie » de Claudine Monteil, Ed. Odile Jacob, 2016 ;
> « Madame Curie » de Eve Curie, éditions Gallimard, 1981 ;
> « Marie Curie et ses filles. Lettres » de Hélène Langevin-Joliot et Monique Bordry, éditions Pygmalion, 2011.
> "Voyage parmi les guerriers" de Eve Curie, New York, Maison française, 1944.
> "Eve Curie, une héroïne de la France Libre dans les conflits du Proche et Moyen-Orient" par Claudine Monteil, 2016.
> Eve Curie, fiche biographique sur wikipedia.

A VOIR :

> Chaîne Youtube du Musée Curie : Conférence « Eve Curie, l’autre fille de Pierre et Marie Curie. Portrait d’une femme libre » de Claudine Monteil, donnée le samedi 13 février 2016 au Musée Curie.
> Chaîne youtube du Musée Curie : Eve Curie parle sur Radio Luxembourg en 1939.
> Film d'archive : "Eve Curie, in the land of my mother, 1941".