Un portrait urbain de Marie Curie par Yann Lazoo


Les matériaux et techniques du street-art caractérisent ce portrait de Marie Curie.

© Sacha Lenormand / Musée Curie

Yann Lazoo (Français),
DRIPPIN MARIE, 2017,
Aérosol de peinture sur toile, 100 x 100 cm,
Service des Ressources historiques du Musée
Curie

© H. J. Whitlock&Sons / Musée Curie (coll. ACJC) MCP2330

Marie Curie en 1913

Réalisé par Yann Lazoo en 2017, ce tableau est tiré d’une des photos les plus connues de la physicienne. C’est un portrait au cadrage serré, on ne voit que la tête et le début des épaules de Marie Curie. L’œuvre est conçue avec des points de bombe de peinture dont l’artiste a laissé couler le surplus, créant ainsi un effet graphique particulier, auquel le titre fait directement référence. Il s’agit d’une manière de faire propre à l’artiste. Par ailleurs, ce n’est pas le premier portrait de Marie Curie à avoir été réalisé avec des techniques de street-art. En effet, C215 en a réalisé un dans le jardin du Musée Curie en 2016 et un deuxième dans la rue d’Ulm en 2018. Les tons utilisés dans le tableau de Lazoo sont majoritairement vifs et foncés, hormis les couleurs pastel utilisées pour représenter les zones claires du visage et du fond. L’artiste a créé cette œuvre dans le cadre d’une performance artistique pour le Musée Curie, dans les jardins, lors de la célébration du 150ème anniversaire de la naissance de Marie Curie, le 7 novembre 2017. Le musée lui a ensuite acheté l’œuvre.

La méthode innovante utilisée par l’artiste fait penser au pointillisme et au pop art. L’artiste explique sa technique ainsi « l'intérêt de la coulure est pour moi de pouvoir inscrire la durée du geste (le temps de pression sur le gicleur de bombe) sur l'œuvre »1. Par ailleurs, les couleurs utilisées ne sont pas réalistes quand elles sont observées de près mais le recul donne à l’ensemble une cohésion qui fait apparaitre le visage de Marie Curie. La distance d'appréciation est donc importante. Lazoo souligne que cet effet est recherché et symbolique, selon lui « l'image collective d'une personnalité est évidente d'un point de vue globale, mais reste un mystère à proximité. ».

On peut penser que l’artiste a voulu en quelques sortes actualiser la figure de la physicienne en faisant un portrait avec des techniques picturales récentes. Cette hypothèse a été confirmée par Lazoo, il dit que son « travail de portrait est une réflexion de l'impact du temps sur la notoriété d'une personnalité. Il symbolise l'altération de l'image par le temps. ». Puis, il rajoute que « dans le cas de Marie Curie, je trouvais en plus que cette inscription du temps était cohérente avec le principe de la décroissance radioactive, qui met en rapport le rayonnement radioactif avec le temps. ». L’artiste établit donc ici un parallèle entre la décroissance dans le temps du nombre d’atomes radioactifs, et l’évolution de l’image de Marie Curie dans notre société au fil du temps.

Texte de Anaïs Ferreira
en collaboration avec le Musée Curie

1L'ensemble des citations est tiré d'un échange mail avec l’artiste ayant eu lieu le 16/12/2020.