Cultiver l'engouement suscité par la découverte du radium : le succès commercial et publicitaire de la cosmétique radifère Tho-Radia
Profitant de l’engouement médiatique qu’a suscité la découverte du radium, de nombreux cosmétiques dits “radifères” aux vertus régénératrices et revitalisantes firent leur apparition dès 1910. C’est le cas de la marque pionnière Tho-radia convoquant le registre de la science pour son entreprise commerciale et publicitaire.
Profitant de l’engouement médiatique qu’a suscité la découverte du radium, de nombreux cosmétiques dits “radifères” aux vertus régénératrices et revitalisantes firent leur apparition dès 1910. C’est le cas de la marque pionnière Tho-radia convoquant le registre de la science pour son entreprise commerciale et publicitaire.
Profitant du succès médiatique de la découverte du radium et de l’engouement que suscite la mise en évidence de ses vertus régénératrices et revitalisantes, le pharmacien français Alexandre Jaboin développe la microcuriethérapie. Sous forme de médicament et de cosmétique, le radium quitte l’espace du laboratoire pour conquérir le grand public. L’usage de matériaux radioactifs étant jusqu’alors contrôlé par une législation laxiste, de nombreux cosmétiques dits “radifères” apparaissent sur le marché dès les années 1910. Compte tenu de sa rareté et de son prix élevé, ces produits contiennent en réalité une quantité infime, voire nulle, de radium. C’est le cas de la marque Tho-radia, pionnière dans la production de crèmes composées de radium et de thorium qui développera par la suite une gamme de produits constitués de poudres, de savons ou encore de dentifrices.
Si l’on en croit une publicité parue dans la Revue des spécialités publiée après 1933 le succès de la gamme Tho-radia « se justifie d’abord par les propriétés embellissantes et curatives du produit » mais s’explique également par « l’importante et méthodique publicité qui préside à son lancement ».
Les publicités réalisées par le photographe-illustrateur Tony Burand donnent à voir le visage certainement photographié puis colorisé d’une jeune femme blond platine irradiée par une intense lumière provenant d’un pot de crème Tho-radia placé sous son visage. Cette mise en scène joue sur le fantasme populaire planant autour du précieux élément. Celui-ci serait investi de qualités luminescentes thérapeutiques voire magiques. Cette belle jeune femme se porte ainsi garante des propriétés remarquables de la crème qui « active la circulation, tonifie, raffermit les tissus, élimine la graisse, supprime les rides. ».
Pour donner une caution de renom supplémentaire à ces produits, la marque attribue la formule miraculeuse au « Docteur Alfred Curie », un homonyme sans lien de parenté du couple Curie. Le patronyme « Curie » se fait en réalité uniquement le garant prestigieux d’un succès commercial et promotionnel.
La marque Tho-radia convoque donc le registre de la science pour les besoins de son entreprise commerciale et publicitaire tout en cultivant le fantasme populaire autour du radium.
Dès 1937, le radium est interdit dans les produits non pharmaceutiques. La marque Tho-Radia retire du marché ses cosmétiques radioactifs, et continuera d'exister jusqu'aux années 1960. Miss France 1948, Jacqueline Donny, en deviendra même l’ambassadrice.
Texte de Constance Théodore
en collaboration avec le Musée Curie
et Ecole du Louvre Junior Conseil
Affiche publicitaire pour la crème Tho-radia, 1934.