Paul d'Ivoi, La course au radium : un récit teinté d’une ambiance scientifique fantaisiste


Durant les années folles, le radium connait un intérêt extraordinaire qui se voit diffuser passionnellement grâce à la littérature et au cinéma. À titre d’exemple, le romancier Paul d’Ivoi publie en 1909 dans sa série des Voyages excentriques le roman La Course au radium.

© Musée Curie / coll. imprimés

Paul d'Ivoi, "La course au radium", Boivin et Cie éditeur, 1910

La découverte du radium et de ses propriétés thérapeutiques, énergétiques ou encore luminescentes utilisées en horlogerie a suscité un engouement sans précédent durant l’entre-deux-guerres. Ce vif intérêt s’est illustré au départ dans une production presque exclusivement industrielle, au point d'être utilisé dans de nombreux produits de consommation de luxe tels que des crèmes rajeunissantes, des cigarettes, des réveils… Cet intérêt sans précédent s’est diffusé passionnellement grâce à la littérature, la musique et le cinéma.

En 1909, le romancier Paul d’Ivoi publie La Course au radium dans sa série des Voyages excentriques. L’ambiance scientifique et fantaisiste de cette série de romans publiés entre 1894 et 1916 s’inspire des Voyages extraordinaires de Jules Verne. Cette attitude fantasque à l’égard de la science se laisse lire dans la quatrième de couverture résumant l’intrigue du roman :

« Les Parisiens en liesse assistent au départ de la plus fabuleuse randonnée jamais organisée : d'audacieux automobilistes vont faire le tour du globe, (…) à bord de sa « de Dion », l'intrépide Fleuriane Defrance, qu'accompagne le célèbre détective Dick Fann, n'ambitionne pas la victoire : elle ne s'est engagée dans la compétition que pour confondre le joaillier Larmette qui court sur une puissante Botera. Elle le soupçonne en effet d'être le voleur du radium, l'étrange minerai qui permet de transformer de viles pierres en joyaux inestimables. »

L’intrigue du roman repose donc sur le vol du radium, cet « étrange minerai » tel qu’il est caractérisé dans la quatrième de couverture, auquel le romancier attribue des qualités remarquables. Le roman de Paul d’Ivoi cultive ainsi les fantasmes populaires planant autour de « l’extraordinaire » élément chimique. Le radium apparaît comme un symbole de modernité, et si l’élément chimique n’est pas explicitement représenté sur la couverture, celle-ci se fait une synthèse de l’utopie scientifique en vogue. Dans la partie haute de l’illustration se trouve un avion transportant un cheval. Le registre céleste se caractérise par une ambiance résolument futuriste se faisant la démonstration des progrès de l’aviation et notamment des premiers vols motorisés. La partie basse, quant à elle, est teintée d’une ambiance davantage folklorique et orientalisante. Des chevaux représentés en raccourci sont chevauchés par des cavaliers levant les bras en direction de l’avion. La course-poursuite se caractérise par une ambiguïté tentant de concilier folklore et avant-gardisme. L’intrigue autour du radium est ainsi mise en scène dans cette veine résolument moderne que cultive la couverture.

Durant l’entre-deux-guerres, l’éloge du radium devient un leitmotiv résolument répandu et estimé. On peut parler à ce titre d’une véritable culture du radium.

Texte de Constance Théodore
en collaboration avec le Musée Curie
et Ecole du Louvre Junior Conseil