Pavillon Curie, Institut du radium (1930)
« Marie, pour lire ces papiers, gagne une pièce très claire, banale, étroite, où un profane reconnaît difficilement le cabinet de travail d’une savante illustre. Un bureau ministre en chêne, un classeur, des bibliothèques, une vieille machine à écrire, un fauteuil de cuir lui confèrent une décence anonyme… »
Eve Curie, Madame Curie, 1981
L’Institut du radium est un institut de recherche sur la radioactivité. C’est à partir de 1909, sous l’impulsion de l’Institut Pasteur et de l’Université de Paris, que l’architecte Henri-Paul Nénot élabore les plans des laboratoires et des bâtiments, dans le quartier savant de la Montagne Sainte-Geneviève. Le chantier s’est étalé sur une durée de quatre années de 1912 à 1915. En juillet 1914, les trois bâtiments qui constituent initialement l’Institut du radium sont complétés : le Pavillon Curie, le Pavillon Pasteur, et le Pavillon des sources. Le Pavillon Curie abrite le laboratoire de physique et de chimie, et est dirigé par Marie Curie. Dans le Pavillon Pasteur se trouve le laboratoire de biologie et de radio-physiologie, dirigé par le Dr. Claudius Regaud. Le Pavillon des sources est lui destiné au stockage des matières radioactives de l’ensemble de l’Institut du radium. Achevé à la veille de la Grande guerre, le tout nouvel Institut est aménagé progressivement.
A l’intérieur du pavillon Curie un espace est dédié à la directrice du laboratoire, Marie Curie. Il est composé d’une entrée indépendante, d’une salle de repos, d’un bureau, d’une salle de laboratoire de physique et d’une salle de laboratoire de chimie. Le bureau est la seule pièce préservée en l’état. Le mobilier en chêne qui s’y trouve faisait partie de la commande faite au menuisier lors de la construction du bâtiment.
Dans les archives du Musée Curie, le schéma d’une table bureau permet de confirmer son origine historique : c’est un bureau à caissons, ou « bureau-ministre » tel qu’on peut en trouver sous le 1er Empire, muni de tiroirs superposés de chaque côté des jambes de la personne qui y est assise. La hauteur du plateau laisse supposer que ce bureau est possiblement bâti sur mesure adapté à la petite taille de Marie Curie. Depuis sa construction jusqu’à son exposition au public, le bureau n’a été déplacé que de quelques centimètres de sa place initiale, où il a laissé des marques que l’on peut observer sur le parquet de la pièce. Conservé en l’état, cet élément de mobilier revêt une forte dimension symbolique pour les visiteurs qui peuvent voir le bureau occupé par les différentes directrices et directeurs du laboratoire : Marie Curie, André Debierne, Irène puis Frédéric Joliot-Curie.
Sur les photos d’archives de la période où Marie Curie dirigeait le laboratoire, on remarque la présence d’un deuxième bureau, avec un seul tiroir à droite, juxtaposé au bureau de la directrice. Ce petit meuble était probablement destiné à Léonie Razet, la secrétaire du laboratoire, et il n’apparait plus dans les photos d’archives correspondant à la période de la direction d’Irène Joliot-Curie.
A la mort de Frédéric Joliot-Curie, en 1958, le physicien Jean Teillac est nommé directeur du laboratoire et fait le choix de ne pas occuper les locaux, marqués par la mémoire de ses illustres prédécesseurs. Il installe son bureau dans les nouveaux locaux d’Orsay, et laisse ainsi le bureau et le laboratoire en l’état pour qu’ils puissent être préservés. C’est alors que s’opère la première étape de « patrimonialisation » des lieux. L’association des amis des Joliot-Curie (AJC, aujourd’hui ACJC), constituée après la mort de Frédéric Joliot, propose des visites informelles du bureau aux amis et anciens collègues de la famille. Au cours des années, le public intéressé par ces lieux historiques s’élargit, notamment le public étranger venant de Pologne. En 1981, pour rendre les pièces accessibles à ce public, on effectue une décontamination grâce au soutien financier de la Ligue contre le cancer.
Le bureau de Marie Curie est aujourd’hui un lieu de mémoire et d’histoire, qui attire la curiosité d’un nombre croissant de visiteurs. Cette pièce, à la fois sobre et fonctionnelle, est le vestige d’un laboratoire unique en son genre et le cœur de ce musée d’histoire des sciences. Le bureau-ministre de Marie Curie, qui a subi quelques petites métamorphoses depuis sa création, est inventorié dans les collections du Musée.
> Exposition virtuelle dédiée au bureau de Marie Curie;
> Fiche documentaire sur le bureau de Marie Curie.