Une histoire de la radioactivité jalonnée de noms féminins : Sonia Cotelle devant sa paillasse de l'une des salles de chimie, une indispensable collaboratrice de Marie Curie au sein de l’Institut du radium


Entre 1920 et 1940, les femmes représentent environ un tiers du personnel de laboratoire de l’Institut du radium. De
nombreux clichés pris dans les laboratoires tel que la photographie de Sonia Cotelle devant sa paillasse (…), donnent à voir ces scientifiques femmes certes plus discrètes mais néanmoins indispensables à l’Institut du radium.

© J. Boyer / Musée Curie (coll. Institut du radium)

Sonia Cotelle devant sa paillasse de l'une des salles de chimie, vers 1925.

Si l'historiographie et le grand public n’aura retenu que certaines figures féminines pionnières de la science telles que Marie Curie et Irène Joliot-Curie, l'histoire de la radioactivité est en réalité jalonnée de noms féminins. Entre 1920 et 1940, les femmes représentent environ un tiers du personnel de laboratoire de l’Institut du radium. Moins célèbres que Marie Curie, Catherine Chamié, Sonia Cotelle et Renée Galabert, Marthe Leblanc ou encore Marguerite Perey ont participé activement à la production scientifique du laboratoire. Bien que Marie Curie reste au centre de toutes les initiatives menées à l’Institut du radium en tant que "patronne" du laboratoire Curie, ses collaboratrices ont occupé une place importante autant par leur nombre que par leurs activités à l’Institut du radium.

De nombreux clichés, à l’image de la photographie de Sonia Cotelle devant sa paillasse de l’une des salles de chimie prise en 1925, donnent à voir ces scientifiques indispensables à l’activité de l’Institut.

La photographie de Sonia Cotelle devant sa paillasse représente la jeune chimiste en pleine préparation. Le flou photographique suggéré par ses actions laisse imaginer son dynamisme. Ce bougé moelleux qui caractérise la figure humaine est en totale opposition avec le reste de la scène marquée par une très grande netteté. En effet, les outils statiques de la scientifique présents sur la paillasse ont été photographiés avec une très grande précision. Ces objets aux formes géométriques disposés à la manière d’une nature morte se font le pendant inerte de la scientifique. Ce qui tend également à renforcer le contraste entre la figure humaine et le laboratoire, c’est certainement le fait que Sonia Cotelle soit reléguée à l’extrême gauche de la photographie, face à un mur uni, alors que le reste de la scène, ouvrant sur une fenêtre, baigne dans une lumière diffuse. La grande finesse dans la représentation et la prééminence des outils sur la figure humaine semble faire du laboratoire le propos de cette photographie. Néanmoins, c’est peut-être finalement le flou vaporeux et la simplicité qui caractérise la figure humaine qui fait de Sonia Cotelle le sujet principal.

Cette photographie illustre ainsi avec une grande simplicité le travail certes plus discret, moins connu, et néanmoins proactif des collaboratrices de Marie Curie au sein de l’Institut du radium.

Qui est Sonia Cotelle ?

Après l’obtention d’une licence de science ainsi que de trois certificats de chimie à l’université de Paris, Sonia Cotelle, née Sonia Slobodkine, intègre le laboratoire Curie en 1919. Initié à la pratique minutieuse et longue des solutions radioactives et des mesures chimiques et physiques par Marie Curie, la physicienne et chimiste polonaise se voit nommée chargée du service des mesures et des préparations des sources radioactives en 1924. Régulièrement malade à partir de 1927, Sonia Cotelle est envoyée en convalescence à la suite de problèmes de santé alarmants liés à la manipulation d’éléments radioactifs. Malgré les recommandations médicales en faveur d’un repos absolu, la chimiste ne cessera de manifester dans ses lettres à Marie Curie son impatience à revenir au laboratoire.

Texte de Constance Théodore
en collaboration avec le Musée Curie
et Ecole du Louvre Junior Conseil